dimanche 7 novembre 2010

Programmez la fin du monde

20090623_Asteroid_impact

Les faiseurs d’apocalypse vous prédisent la fin du monde pour 2012 ? Mais 2012, c’est loin ! Pourquoi attendre quand on peut programmer soi-même la destruction de la planète ? Le mieux est encore de balancer un bon astéroïde sur notre vieille Terre et tous les Bruce Willis version Armageddon n’y pourront rien. Mais une question cruciale se pose : quelle taille d’astéroïde choisir, quelle doit être sa composition, sa vitesse, son angle d’attaque, etc ? Compliqué… Si vous souhaitez une réponse à toutes ces interrogations, le simulateur “Impact : Earth !” est pour vous.

Développé par l’université Purdue (Indiana) et l’Imperial College, il s’agit avant tout d’un outil destiné aux chercheurs et aux étudiants, élaboré pour comprendre les dommages créés par un impact d’astéroïde. Ce qui n’empêche pas la NASA et le Département pour la sécurité intérieure des Etats-Unis de s’en servir pour imaginer des scénarios-catastrophes, ainsi que l’explique Time. C’est aussi un joujou amusant et pédagogique pour tous les destructeurs maléfiques qui sommeillent en nous…

Avant de lancer le programme, il vous faut déterminer plusieurs paramètres : le diamètre de l’astéroïde, sa composition (glace, roche poreuse, roche dense, fer sont prévus mais on peut rentrer n’importe quelle autre donnée de son choix), l’angle de l’impact, la vitesse de l’objet au moment de son arrivée chez nous, ainsi que le terrain qu’il rencontre : océan, roche sédimentaire, roche magmatique (comme le granite ou le basalte). Enfin, le simulateur vous demande de préciser à quelle distance de l’impact vous vous trouvez. Cela aura son utilité plus tard…

Pour évaluer les dégâts que je pouvais causer à la planète depuis mon fauteuil, j’ai commencé petit et multiplié le diamètre de mon projectile par 10 à chaque essai, comme un joueur de roulette qui mise de plus en plus au fur et à mesure que la partie avance… Tous les autres paramètres sont restés fixes : astéroïde de roche dense, angle de 45°, vitesse de 40 km/s au milieu de la fourchette proposée, point d’impact en roche sédimentaire comme notre Bassin parisien… Et je me suis installé le plus loin possible (pas fou !), exactement de l’autre côté de la Terre, à 20 000 kilomètres de là.

Premier essai avec un gros caillou de 10 m qui a fait l’effet d’un pétard mouillé. En effet, comme c’est le cas pour l’immense majorité des corps extra-terrestres qui nous arrivent droit dessus chaque jour (des poussières et du gravillon pour l’essentiel), l’atmosphère joue à plein son rôle protecteur. En raison du frottement de l’air, le projectile commence à se disloquer et à chauffer à environ 68 km du sol et se transforme en nuée de débris ardents à 32 km d’altitude. De gros fragments peuvent atteindre le sol mais ce sera tout. Ce genre d’intrusion arrive en moyenne tous les 44 ans.

Pour obtenir un véritable impact, il faut passer à la catégorie supérieure : 100 m de diamètre, soit la longueur d’un terrain de football. L’astéroïde est trop gros pour se consumer dans l’atmosphère et, même s’il se fractionne, il percute le sol à la vitesse hypersonique de 54 000 km/h ! L’énergie dégagée dans le choc est équivalente à celle de l’explosion de 42 millions de tonnes de TNT, soit 2 800 fois la bombe d’Hiroshima. Le cratère obtenu mesure 2 km de diamètre, soit un peu plus que le célèbre Meteor Crater situé en Arizona, qui a été creusé par un astéroïde deux fois plus petit mais plus dense car métallique. Les effets de l’impact restent très locaux. Statistiquement parlant, un astéroïde de cette taille frappe la Terre tous les 8 900 ans.

En arrivant à un diamètre d’un kilomètre, les choses sérieuses commencent et votre potentiel destructeur s’élève sérieusement tout en restant cantonné à l’échelle d’un petit pays. Le bestiau rocheux heurte le sol à la vitesse de 143 000 km/h et vous explose 20 millions de bombes d’Hiroshima d’un coup. Le cratère qui en résulte mesure 22 km de diamètre. Tout en étant de l’autre côté de la Terre, le bruit de l’explosion me parvient 17 heures après… 1,8 million d’années est l’écart qui sépare en moyenne deux catastrophes de ce genre.

Ajoutons un zéro au diamètre : 10 km, c’est quasiment le diamètre de Paris intramuros et de l’astéroïde qui, il y a 65 millions d’années, a créé un hiver nucléaire sur notre planète et fait disparaître les dinosaures. Tout cela a pris du temps. Le jour de l’impact, je vais sentir une petite brise tout en entendant un grondement équivalent à celui de la circulation automobile. Des poussières et des cendres finiront aussi par m’atteindre. Sur place en revanche, il n’y aura plus rien si ce n’est un grand cratère de 168 km de diamètre et de 1,38 km de profondeur. Et à des centaines de kilomètres à la ronde, la boule de feu résultant de l’explosion cataclysmique aura tout brûlé sur son passage. Selon “Impact : Earth !”, il s’écoule 370 millions d’années entre deux pareils événements.

Avec un monstre de 100 km de diamètre, on s’approche vraiment d’un scénario de fin du monde, même si l’on vit aux antipodes du lieu de la catastrophe, où un cratère plus grand que la France s’est creusé. Là où je suis, la secousse sismique due à l’impact se ressent clairement. Le bruit de l’onde de choc est intense et approche les 100 décibels. Le souffle de l’explosion peut atteindre 475 km/h et fait tomber les immeubles les plus hauts et les plus fragiles, ainsi que 90% des arbres. Il est même possible que la durée du jour soit modifiée de quelques secondes ! Ce genre de collision n’a pu se produire que pendant la jeunesse du système solaire qui ressemblait à un grand jeu de flipper cosmique.

On a donc atteint les limites plausibles du jeu. Mais comme c’est un jeu, ajoutons un dernier zéro. Car il se trouve qu’il existe un astéroïde (une planète naine en réalité) nommé Cérès, dont le diamètre approche le millier de kilomètres. Si Cérès, pour une raison aussi inconnue qu’improbable, quittait la ceinture d’astéroïdes dans laquelle elle se situe (entre Mars et Jupiter) et fonçait droit vers la Terre, que se passerait-il ? Un immense continent de roche en fusion s’étendrait sur des milliers de kilomètres autour du point d’impact, le souffle de l’explosion m’attendrait avec une vitesse approchant les 10 000 km/h et la boule de feu ferait le tour total de la Terre. Game over.

Pierre Barthélémy

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